MAJ : 29 avril 2021
Le Ballet royal du Cambodge (របាំព្រះរាជទ្រព្យ - Robam Preah Reach Troap), a été inscrit en 2008 sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l'UNESCO. Cette formation est la plus récente et la plus illustre émanation des ballets formés au cours des âges pour servir les divinités hindoues, puis bouddhiques sous le règne du roi Jayavarman VII.
Investie d’un rôle sacré et symbolique, la danse incarne les valeurs traditionnelles de raffinement, de respect et de spiritualité. Son répertoire immortalise les mythes fondateurs de la culture khmère hindouisée.
Le répertoire classique comporte quatre types de personnages : Neang នាង la femme, Neay rong នាយរុង l’homme, Yeak យក្ស le géant et Sva ស្វា le singe, chacun avec ses couleurs, ses costumes, son maquillage et ses masques. La gestuelle et les postures, dont la maîtrise exige 10 à 15 années de formation, traduisent toute la gamme des émotions humaines.
L'orchestre pin peat anime la danse, tandis qu’un chœur de femmes chantent l’intrigue et souligne les émotions mimées par les danseurs.
Le Ballet royal a pratiquement disparu sous le régime des Khmers rouges qui a exterminé la plupart des maîtres de danse et les musiciens. Immédiatement après la défaite de Pol Pot en 1979, des troupes de danse se sont reformées dans les camps de réfugiés à la frontière de la Thaïlande et ont repris les représentations de l’ancien répertoire. Si le ballet a quasiment retrouvé sa splendeur d’antan, il n’en reste pas moins confronté à de nombreuses difficultés telles que le manque de fonds et de lieux de représentation. Plane également la concurrence des médias modernes et le risque d’être transformé en simple attraction touristique.
Personnages féminins
Personnages masculins
Ogres
Sva : singes
Apsaras អប្សរា : nymphes/danseuses célestes
Kinnorey កេន្នរី : les mythiques kinnari (p. ex. Manohara)
Maccha ម្ចាស់ : sirènes (p. ex. Suvannamaccha)
Ngoh : personnage masculin représentant un négrito
Eysey ឥសី : ermites ou rishi (rôle non dansé)
Porteurs : vaguement impliqués dans la danse, mais généralement ne dansent pas.
Garuda et oiseaux mythiques (p. ex. Jatayu)
Cerf សត្វក្តាន់ : le cerf d'or សត្វក្តាន់ dans le Reamker រាមកេរ្តិ៍
Paon ក្ងោក
Lion តោ
Cheval សេះ
Les costumes de la danse classique khmère sont richement brodés et ornés, comprenant parfois des paillettes et des gemmes. Ils sont considérés comme représentatifs de ceux des divinités, notamment dans la stylistique post-angkorienne. Certaines pièces du costume sont cousues directement sur les danseurs pour un ajustement serré.
Les différents costumes permettent d'identifier les quatre types de personnages décrits ci-avant.
L'actuel costume des apsaras (danseuses ou nymphes célestes), en particulier la tiare à trois pointes, est basé sur les bas-reliefs d'Angkor Vat ; il est une évolution choisie par la reine Sisowath Kossamak pour se démarquer de l'influence siamoise (thaïe) et retourner aux racines khmères de la période angkorienne.
Le costume typique féminin (Neang) se compose d'un sampot sarabot, du sbai, d'un corsage ou maillot de corps et du srang kar auxquels s'ajoutent des bijoux :
Les bijoux du rôle féminin comprennent un grand pendentif en filigrane carré accroché par le coin, des bracelets aux poignets, un brassard au bras droit, des bracelets de chevilles censés ancrer les personnages à la terre et une variété de chaînes de corps.
Les personnages masculins, (Neay rong), portent des costumes plus complexes que ceux des femmes, car il nécessitent que certains éléments, comme les manches, soient cousues à même le corps. Le costume masculin typique comprend un sampot sarabap, un pantalon court, une chemise, un srang kar, des épaulettes cambrées, trois bannières à la ceinture et un sangvar.
Les personnages masculins portent les mêmes bijoux de cheville et de poignet que les féminins, mais avec l'ajout d'un ensemble supplémentaire de bracelets au poignet. Contrairement aux personnages féminins, ils ne portent pas de brassards. Ils portent également un ornement en forme de cerf-volant appelé un sloek po (nommé d'après la feuille de l'arbre de la Bodhi ដើមពោធិព្រឹក្ស), qui sert de point central pour leur sangvar.
Il existe plusieurs types d'ornements de tête qui dénotent le rang du personnage : tiare, couronne, masque.
Les coiffures de certains personnages comprennent des ornements d'oreille ainsi que des boucles d'oreilles. Les ogres et les singes, portent des masques. Ces mêmes personnages, lorsqu'ils sont de rang royal ou supérieur, portent des masques avec un mokot មកុដ attaché.
Les danseurs sont traditionnellement ornés de fleurs fraîches parfumées, parfois remplacées par des fleurs artificielles. Le pompon floral est traditionnellement fait de jasmin phka mliah ផ្កាម្លិះ (Jasminum sambac) ficelé avec des fleurs de Michelia, (Michelia alba ou Magnolia champaca). Le rôle Neang porte une rose au-dessus de l'oreille droite et un gland floral attaché au côté gauche de la couronne tandis que le rôle de Neay rong porte une rose sur l'oreille gauche et un gland floral du côté droit. Parfois, les danseurs portent des guirlandes de jasmin arrangées et fixées aux poignets. Le rôle de l'Apsara est le plus souvent orné de fleurs de frangipanier phka champei ផ្កាចំប៉ី (Plumeria obtusa) ou de cultivars blancs de Plumeria rubra ; parfois les plumerias sont attachés le long des cheveux.
La danse classique khmère utilise une pièce musicale particulière pour chaque événement, par exemple, lorsqu'un danseur entre en scène ou effectue des actions telles que voler, marcher ou quitter la scène. Ces pièces forment des suites. De nouvelles œuvres sont rarement créées. Voici une liste de pièces utilisées dans le répertoire :
Aujourd'hui, le Ballet royal exécute des danses courtes au service de diverses causes :
Chaque danse narre une histoire. Nombres d'entre elles sont extraites des drames dansés tels que robam mekhala-reamsor et robam sovan maccha.
Nous proposons ici quelques exemples de représentations à caractère religieux et profane du Ballet royal sous la direction de Son Altesse Royale la Princesse Norodom Buppha Devi.
Le 3 décembre 2017, plus de 5000 moines ont fait le déplacement à Angkor Vat à l'invite du Gouvernement royal du Cambodge pour une cérémonie d'offrandes pour la paix. Elle s'est déroulée à l'entrée extérieure ouest d'Angkor Vat. Le Ballet royal, accompagné de l'ensemble pin peat du Palais royal, a offert une danse propitiatoire appelée Buong Suong (បួងសួង), l'une des plus anciennes du répertoire classique khmer. Elle invoque les esprits des souverains du passé pour apporter la paix et la prospérité au Royaume. C'était l'une des rares occasions de voir le Ballet royal dans un cadre rituel.
La danse appelée Robam Tep Monorom (របាំទេពមនោរម្យ) dépeint des dieux et des déesses dansant dans les cieux, revêtus de leurs plus beaux atours. Les costumes des danseuses reflètent ceux des souverains khmers du XIXe et du début du XXe siècle. Le Ballet royal se produit ici devant les délégués de divers pays en présence de S. M. Norodom Sihamoni, le 5 décembre 2018 à la Terrasse des éléphants.
Cette chorégraphie présente une suite de deux danses : Robam Preah Thong Buong Suong / Robam Makar (របាំមករ). Le Ballet royal se produit dans le même cadre que décrit précédemment.
Entre la France et le Ballet royal du Cambodge, c'est une longue histoire d'amour. Comme il serait impossible de citer toutes les histoires, contentons-nous de quelques-unes.
Le premier à s'intéresser et à écrire sur le Ballet royal est George Groslier qui publiera en 1913 : Danseuses cambodgiennes anciennes et modernes.
En 1907, 30 danseuses sont invitées à Paris puis à l'Exposition coloniale de Marseille.
En 1994, Le Ballet royal se produit au Théâtre du Rond-Point à Paris sous l'égide de la Maison des cultures du monde. À cette époque, Erikson Franck écrit dans l'Express : “Françoise Gründ (…), directrice artistique de la Maison des cultures du monde a non seulement invité la troupe pour trois semaines au théâtre du Rond-Point (…), mais elle a aussi aidé à la confection de nouveaux costumes, en fournissant tissus de velours, cabochons et fils d'or. ”
Pour en voir plus, nous vous invitons à rejoindre la chaîne YouTube The Royal Ballet of Cambodia.